2001, vous êtes tranquille derrière votre PC portable lorsque vous recevez un appel. Au bout du fil, Enrico Chivaldori, prince légitime du royaume d’Arulco, situé quelque part en Amérique Centrale et connu pour ses mines d’or et d’argent. Contraint de s’exiler suite à l’assassinat de son père par sa marâtre Dedranna Reitman, il vient vous demander votre aide, par la force, afin de récupérer le trône qui lui est dû. Suite à sa prise de pouvoir, Deidranna exploite le pays pour ses ressources sous une dictature sanglante et sans pitié. Enrico vous demande donc de recruter les membres d’un commando d’élite afin d’aider Miguel Cordonna, leader de la résistance sur place, à renverser Deidranna qui se terre quelque part en Arulco.

Vous voilà donc sur votre ordinateur portable, qui sert d’interface principale pour la partie gestion du jeu. Depuis votre bureau, vous consultez la carte tactique d’Arulco et l’avancée de vos troupes sur le territoire, les villes reprises aux mains de l’armée, les milices en place, mais également les troupes ennemies en approche. Comme tout jeu de stratégie, les zones non découvertes sont grisées, les zones perdues sombres et les repères, très militaires, se font comme sur la bataille navale, via un quadrillage alphanumérique très simple. Sur la partie gauche de cette interface se trouve la liste de vos mercenaires sous contrat (ainsi que les jours restant avant renouvellement ou départ), ainsi que le journal des événements. Sur la partie basse se trouve les réglages visuelles de la carte, le jour, l’heure, votre argent et l’internet.

Joyeuse et formidable invention qu’est l’internet. Vous y passerez également pas mal de temps, puisque vous devrez, et ce dès le début du jeu, aller sur différents sites pour évoluer. L’AIM, ou Association Internationale des Mercenaires, se présente comme un catalogue de mercenaires à recruter pour composer votre ou vos escouades. Chaque mercenaire a ses spécialités, son paquetage, son caractère, ses qualités et ses défauts, sans oublier les compétences de base : agilité, dextérité, force, sagesse, médecine, explosifs, mécanique, leadership et l’adresse au tir. Evidemment, plus les statistiques approchent 100, plus le mercenaire sera bon et son salaire élevé. Vos finances étant limitées, il faudra au début ruser et recruter des mercenaires intermédiaires. Certains s’avèrent très bons dans leur spécialité et ils pourront vous accompagner un bon moment, car ils évoluent et leurs compétences également, grâce à l’expérience des combats et en lisant des magazines spécifiques. Leur salaire aussi augmentera, cela dit. Sachez toutefois qu’un mercenaire mort au combat le restera.

J’évoquais le caractère un peu plus haut, cette dimension est à prendre en compte. Certains mercenaires ne peuvent se blairer, évitez de les mettre dans la même équipe ou vous aurez quelques échanges verbaux savoureux. Certains refuseront même de rejoindre votre équipe si un tel est présent ou qu’un camarade qu’il appréciait est mort sous vos ordres. Il y a même des mercenaires en couple et d’autres qui l’ont été. A l’inverse, certains s’apprécient réellement et seront très heureux de rejoindre vos rangs si leur pote s’y trouve. Il y en a même un qui quittera votre groupe si les combats ne sont pas assez réguliers… A cela s’ajoute, plus tard dans la partie, les mercenaires du MERC, pour More Economic Recruiting Center, une organisation, disons plus discount, avec au catalogue des mercenaires aux tarifs très abordables, mais clairement moins compétents, parfois repris de justice, offrant généralement une ou deux excellentes compétences, le reste étant parfois très bas. J’aimais les utiliser pour le transport de marchandise ou la formation de la milice.

L’internet, c’est également Bobby Ray, le meilleur fournisseur d’armes, munitions et accessoires du coin, le seul qui accepte de livrer Arulco, une fois que vous avez sécurisé l’aéroport, qui se trouve fort heureusement dans une des villes du Nord du pays, pas loin de votre point de chute au lancement de la partie. D’autres sites peuvent être consultés, plus insolites dira-t-on, ce sera à vous de le découvrir. Lorsque vous consultez vos mails, ne négligez pas celui de l’IMP, un autre site permettant de créer votre propre mercenaire, pour un coût unique et qui ne demandera aucun salaire, se voulant être un peu votre personnage à vous. Pour le créer, vous pouvez répondre à un questionnaire très original et ciblé, ce qui déterminera ses compétences et son paquetage de base. Ces paramètres sont modifiables avant validation. Vous pouvez même personnaliser sa voix et son avatar (parmi une sélection de choix).

Pour finir sur l’interface tactique, dans chaque ville reprise à l’armée et sécurisée, vous pouvez former les habitants sur place pour constituer une milice qui se défendra seule face aux attaques ennemies, sans que vos mercenaires soient sur place. Il existe plusieurs niveaux de milice, et plus votre milice est puissante, mieux armée elle sera. La formation de la milice nécessite qu’un de vos mercenaires y dédie 100% de son temps durant une période donnée, temps qui sera plus court si votre mercenaire possède un haut niveau de leadership.

Une alliance ethnique



Lorsque votre commando arrive sur une case de l’échiquier d’Arulco, le jeu passe en mode action, sur le terrain, en temps réel par défaut puis en mode tour par tour lorsque le combat se déclenche, quand un ennemi est repéré ou vous repère, si vous tirez un coup de feu. La vue s’approche de celle de Commandos, sorti un an auparavant. Vous placez vos mercenaires, les passez en vigilance pour tirer sur quelconque ennemi entrant dans le champ de vision, les mettez allongés, accroupis, les faites monter sur les toits, se cacher dans l’ombre. Les combats ressembleront à votre style et il est tout à fait possible de nettoyer une zone discrètement, sans ameuter tous les renforts pour finir dans un affrontement ingérable.

Une fois le combat gagné, lorsque les forces ennemies sont toutes éliminées, l’action repasse en temps réel et vous pouvez ramasser tout ce que vous voulez, fouiller les corps, les maisons, discuter avec les habitants, déclenchant ainsi certaines quêtes, beaucoup d’entre elles étant très intéressantes ou cocasses, débouchant sur des récompenses très intéressantes ou de nouvelles recrues quasi gratuites pour votre escouade. Si l’aéroport est une cible de premier choix pour pouvoir acheminer des munitions, il est également très important de nettoyer les bases militaires, d’où proviennent les forces ennemies et de mettre la main sur les exploitations minières, celles-ci vous assurant un revenu confortable et indispensable pour payer vos mercenaires et les armes.

A ce propos, les armes sont très variées, peuvent être customisées (ajout d’un silencieux, d’une lunette, type de munition), tout comme les gilets pare-balles, pouvant être renforcés par des plaques supplémentaires. Sur le premier tiers du jeu, la prudence sera de rigueur pour survivre, le second tiers, selon vos choix, verra une bascule se faire dans le bon sens financièrement parlant, le dernier tiers étant généralement le nettoyage global de la carte et l’annihilation de toute présence ennemie.

Jagged Alliance 2 offre au joueur une immense liberté d’action et de gestion. Vous pouvez aussi bien faire l’aventure qu’avec un ou deux mercenaires ou alors vous constituer une véritable armée composée de multiples escouades, chacune ayant sa propre vie ou au contraire, les faisant converger aux mêmes points stratégiques pour attaquer une base ennemie avec 12 mercenaires, ce qui rééquilibre les forces en combat. vous pouvez pousser la gestion globale et logistique assez loin, par exemple en prenant possession d’un bâtiment sur la carte pour décider d’en faire votre QG, le point de chute de vos nouvelles recrues. Vous y laissez quelques mercenaires pour garder les lieux, ranger soigneusement vos armes, munitions, armures, accessoires dans des coffres, placards sur place puis, lorsqu’un réassort urgent est nécessaire, envoyer l’une de vos mules au front pour approvisionner l’escouade concernée. Rien ne vous empêche de mettre votre meilleur mécanicien qui réparera les armes et les améliorera, pendant qu’à côté, un mercenaire avec un bon leadership et une compétence élevée, forme un de ses coéquipiers à l’adresse ou à la dextérité. Voter aventure vous ressemblera, rien ne vous empêche de tuer des PNJ ou des potentielles recrues, supprimant ainsi les quêtes qui leurs sont associées.

Si tu fonces, t’es mort



La part stratégique n’est pas à négliger lors de chaque combat. Observer les lieux, approcher doucement, encercler la zone, autant de tâches nécessaires à un combat bien mené et réussi. Les ennemis sont nombreux et n’hésiteront pas à venir en surnombre. Fort heureusement, la réflexion n’est pas leur fort, autant en jouer et les attirer dans un entonnoir pour les éliminer un à un, grâce à des pièges ou l’un de vos mercenaires allongé avec sa mitrailleuse MG42. Vous pourrez découper des passages dans le grillage, ouvrir des brèches dans des murs avec du C4, poser des mines, enfumer un endroit clos pour faire sortir les gardes présents, etc. Toutes ses possibilités permettent de vivre une expérience réellement unique et très satisfaisante lorsque votre plan se déroule sans accroc.

Pour ajouter du réalisme à tout ça, les mercenaires blessés perdent en faculté. Un blessé à la main sera moins adroit au tir, un blessé à la jambe aura beaucoup moins de points d’action disponibles à chaque tour. La guérison, à gérer depuis l’écran tactique, peut prendre plusieurs jours selon la gravité, immobilisant ainsi le soldat blessé et le médecin qui le soigne. Les armes ont toutes un champ d’action, une portée propre, alors autant vous dire qu’avant de déclencher un headshot qui lancera les hostilités, on s’assure de son angle, du placement de ses mercenaires et de la précision de l’arme en question. Malgré cela, les ratés arrivent. Contrairement à beaucoup d’autres jeux en tour par tour, la réussite d’un tir ne dépend pas d’un pourcentage établi plus ou moins aléatoirement et générant parfois beaucoup de frustration (rater un tir à 95%, sérieusement ?) mais de la concentration et des points investis dans le tir en question. Cela est représenté par une mire qui se resserre sur votre cible, garantissant une meilleure réussite qu’un tir ne coûtant que peu de points mais imprécis. La distance, l’arme et la position de votre mercenaire comptera également. Un mercenaire adroit, allongé, avec un fusil à lunettes sera plus efficace que son coéquipier debout, 20 mètres plus loin avec son 9mm. Pas de miracle, que de la logique. Malgré ça, les ratés surviennent ou l’arme peut s’enrayer, souvent au pire moment.

D'un point de vue purement technique, Jagged Alliance 2 frôle la perfection. Côté son, les armes, les voix, l'ambiance et les dialogues sont très réussis, notamment grâce à un excellent travail de reproduction et d'écriture des mercenaires et de leurs relations. Les PNJ ne sont pas en reste, beaucoup déclenchent des quêtes très intéressantes. Graphiquement, le jeu ne manque pas de détails, sur chaque carte, l'exploration est mise en valeur et récompensée, la plupart des bâtiments peuvent se visiter, le tout donne un côté bac à sable très grisant. J'ignore si c'était une volonté des développeurs, mais on a l'impression de jouer aux GIJoe, mais dans un jeu vidéo, tant la liberté d'action est importante. Petit bémol, surtout une habitude désormais ancrée, la caméra ne pivote pas, contrairement à la plupart des jeux présentant un système de vue similaire, qu'ils soient tour par tour ou non, que ce soit à l'époque ou aujourd'hui. Mais cela ne réduit en aucun cas le plaisir global, cela donne simplement quelques situations un peu complexes en plein combat, lorsqu'il faut fuir ou se cacher. ■ Robin Masters pour GameTrip.net